Pierre Bordage ... ou le succès du détestable

[Neryelle]

Ben moi j'ai lu que les chemins de Damas. J'avais pas franchement adoré. Ce que j'aimais pas surtout c'est le fait qu'un chapitre sur deux suivait les deux protagonistes, tandis que le reste suivait... un personnage différent à chaque chapitre. Bon, alors c'est peut-être original, style sympa et tout, mais moi ça, ça m'avait soulé.

Sinon pour le reste du bouquin... ben l'histoire m'avait pas véritablement captivé, mais je dirais pas que c'est mauvais. C'est juste pas trop mon genre, quoi.

[Olive]

Bon, en fait moi, je suis assez loin d'être un fan...

J'ai lu la trilogie des Guerriers du silence, Wang, Les Fables de l'Humpur et Je suis en cours de L'Enjômineur.

Allez, essayons de faire une petite analyse!

Je trouve que Bordage a quand même certains points forts. Tout d'abord celui de créer un monde que l'on a envie de découvrir. J'ai surtout senti ça sur Les Fables de L'Humpur et sur l'Enjômineur, et dans une moindre mesure dans le début des Guerriers du silence. Il sait poser une histoire, faire quelques scènes fortes pour accrocher le lecteur... là-dessus, il maîtrise, même s'il joue finalement beaucoup sur des ressorts classiques.

Maintenant, c'est clair qu'il a pas mal de défauts... niveau style, je dirais que la lourder des phrases, etc... ben, ça dépend aussi beaucoup du travail de correction qu'un éditeur fait faire à son auteur. Abzalon, je ne l'ai pas lu, mais il est peut-être arrivé à un moment où Bordage savait que son roman allait de toute manière se faire publier... L'Enjômineur, parmi ses derniers romans, est plutôt pas mal écrit.

Il a aussi la manie de terminer ses chapitres sur des cliffhangers ou des révélations hyper-importantes, histoire de tenir le lecteur en haleine... C'est classique de la part d'un romancier populaire, mais l'ennui, c'est qu'il en fait souvent trop.

Autre défaut, celui de ne pas trop se faire "ch###" à trouver des résolutions satisfaisantes de ses romans. C'est criant dans tous les romans que j'ai lu de lui: il utilise des raccourcis scénaristiques hallucinants, du genre dans Wang, "oh, personne parmi les plus grands stratèges de la planète n'avait jamais pensé à détruire le ravitaillement ennemi..." qui va croire à ça?
Chez Bordage, les grands méchants sont hyper-forts, quasi-invincibles, et s'écroulent comme des châteaux de cartes lors de l'affrontement final. cf. Wang, les Guerriers... et Les Fables de l'Humpur.

Dernièrechose, l'assènement d'idées reçues, un peu toujours les mêmes. C'est dommage, ses romans seraient beaucoup plus digestes s'ils n'étaient pas parfois bourrés de messages assénés avec lourdeur...
Un exemple typique, c'est Wang, où Bordage décrit une Terre du futur où les pays occidentaux égoïstes et décadents utilisent les quelques immigrés qu'ils acceptent comme gladiateurs dans des reconstitutions historiques à grande échelle... c'est complètement unilatéral, pas du tout réfléchi. Franchement un beau gâchis. Mais comme disait Silex, c'est dans la lignée de bon nombre de romans d'anticipation français... lisez Cette Chère Humanité de Curval dans le même genre...

Personnellement, le meilleur roman que j'ai lu de lui doit être Les Fables de l'Humpur, qui m'a littéralement scotché... au départ. vers le milieu, une fois que tous les personnages principaux se sont rencontrés, on sent qu'il ne sait pas trop vers quoi aller: il enchaîne les allusions sexuelles sympas au départ, puis lassantes, finit en eau de boudin. J'ai fini le roman très vite, car j'avais accroché aux personnages, et une fois qu'on aime au départ, on a tendance à être beaucoup plus tolérant. Il n'empêche que c'était carrément dommage, car si Bordage avait su terminer comme il avait commencé, il aurait fait un chef-d'oeuvre.

Dans un autre genre, j'ai plutôt aimé (malgré des défauts) le premier tome de l'enjômineur, et j'avais apprécié le premier tome des Guerriers du silence, car il mettait en scène un anti-héros pour présenter son histoire... bizarre, que celui-ci se soit transformé en un (super)héros insipide, et que les deux tomes suivants n'aient pas gardé cette fraîcheur! Surtout la fin, totalement pompée sur l'Incal...

Sinon, sur le succès de l'auteur... que dire? Bordage est un romancier populaire, qui fait des histoires finalement assez simples, avec un message parfois simpliste et clairement très orienté politiquement. Il utilise des recettes classiques pour "scotcher" le lecteur au bouquin, et certains lecteurs ne demandent pas davantage.
(ceci dit sans vouloir te vexer, Orque fou!!)

Bon, je vous laisse, j'ai les doigts qui chauffent...

Edit: Bon, après m'être relu, il est clair que je n'ai vraiment pas l'air d'avoir aimé... alors que finalement, c'est faux. J'apprécie plutôt la lecture d'un roman de Bordage (à part Wang). Ce sont des romans d'aventure agréables, à lire sans trop se poser de questions. Simplement, les défauts qu'il affiche finissent par me taper sur le système...

[orque fou]

je ne suis pas vexé olive, au contraire, je revendique mon amour des romans simplies et accrocheurs!! j'adore les FNA, même ceux qui seraient impubliables aujourd'hui, j'aime perry rhodan et son scénario inlassable, j'aime tous les romans des 50's écrits sur commandes ou pour ne pas dépasser un certain nombre de mots. C'est pas toujours fin, mais ça me plait, et je les défend bec et ongles!!

[Silex]

Hehe, Olive, c'est peut-etre aussi un truc personnel, mais le cote gros mur entre pays occidentaux et ceux de l'est j'ai pas trouve ca irrealitse du tout dans Wang. Unilateral, certes, mais c'est un peu de ca que le monde occidental avait l'air, vu par les yeux des gens de "l'autre cote du mur", il y a 20 ans.

Je concois que ce n'est pas du tout ce que Bordage avait a l'esprit en ecrivant le roman.

[Olive]

... j'aime tous les romans des 50's écrits sur commandes ou pour ne pas dépasser un certain nombre de mots. C'est pas toujours fin, mais ça me plait, et je les défend bec et ongles!!

Et nous sommes presque deux! J'ai beaucoup de tendresse pour ces bouquins-là aussi. Même si ces temps-ci je suis souvent déçu quand je "craque" sur l'un d'eux, il reste quand même que j'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir toute cette frange de littérature!

[Zordar]

Hehe, Olive, c'est peut-etre aussi un truc personnel, mais le cote gros mur entre pays occidentaux et ceux de l'est j'ai pas trouve ca irrealitse du tout dans Wang. Unilateral, certes, mais c'est un peu de ca que le monde occidental avait l'air, vu par les yeux des gens de "l'autre cote du mur", il y a 20 ans.

Surtout que pour la construction de murs on est en plein dans l'actualité !

[Jean XIV]

Moi, contrairement à certains, j'apprécie Bordage: Wang, Les derniers hommes, Les guerriers du silence sont autant de romans que j'ai découverts avec plaisir. Comme quoi, les goûts et ...

[orque fou]

je suis en train de lire rohel, ça ressemble énormément aux guerriers du silence mais c'est pas mal. Ca me fait un peu penser à un roman feuilleton comme au début du siècle dernier.

Par contre, ça fait 2 semaines que j'ai commencé une itw avec P.B, et toujours pas de réponse...

[Jean XIV]

J'ai reçu ce matin 3 romans de Bordage.
- Atlantis
- Les fables de l'Humpur
- La citadelle Hyponéros (Cycle Les guerriers du silence tome 3)
Eh oui, moi, j'apprécie cet écrivain!

[IreneDelse]

Pour ce qui est des auteurs SF en France et les 68ards, petite question: vous en connaissez des auteurs de SF francaise qui ne sont pas de gauche?

Maurice G. Dantec, ça vous dit quelque chose ? Et Houellebecq ?

Et vous en connaissez qui ecrivent sans lourdes connotations politiques?

Là, on est d'accord, il n'y en a pas beaucoup. Y compris les 2 que je citais plus haut

[orque fou]

Bravo Jean XIV, j'ai lu les 3!!

Atlantis est le moins bon, je pense que des 2 autres, lhumpur tire mieux son épingle.

[Jean XIV]

Je suis plutôt surpris du non-chauvinisme français à propos de Bordage...
Personnellement, j'ai lu Wang, Les guerriers du silence et j'entame Les derniers hommes.
Sans être des monuments de la SF, ils métitent plus ce qu'on en a dit! Et c'est un Belge qui parle...

[UNblue]

'Les Guerriers du Silence' est le premier roman de Bordage, il a pris toutes les idées qu'il avait mises de côté et les a mélangées dans un seul roman. D'ailleurs, en arrivant au 3e tome ça se sent qu'il a crâmé toutes ses idées au début.

L'avis perso du snob de la SF, c'est que ses univers sont intéressants et originaux ; mais les mises en scène, les intrigues et les débats philosophiques qui en découlent sont beaucoup moins bons. En plus, je me fatigue assez rapidement des souffrances inimaginables qu'il adore infliger à ses personnages toutes les deux pages ; ça n'a clairement pas le brio de Dan Simmons, qui torture ses personnages avec beaucoup plus d'élégance.

[Jean XIV]

J'ai terminé "Les derniers hommes"; ça m'a plu! Bordage a vraiment des talents de conteur où l'homme reste toujours le centre

[Macada]

J'ai lu le cycle de Rohel (y'en a 12 ou 13 je crois). Ca se lit très bien.
Ceci dit c'est toujours Wang qui tient la tête pour moi.

[LibrairieM]

J' ai lu pas mal de livres de Bordage, je n'ai jamais été déçu.
J'ai commencé par la SF de Bordage, Wang, les guerriers du silence, Abzalon, puis la fantasy, Les fables de Lumpur, l'enjomineur. En chemin, quelques romans un peu moins typés, comme les chemins de Damas ou l'Evangile du Serpent

Je n'ai pas ressenti la lourdeur du phrasé évoqué plus tot dans le topic. J'aime etre happé par l'histoire, et je mesure le plaisir que me procure une lecture à l'impatience qui me tiraille en pensant au moment ou je pourrais à nouveau reprendre le fil de l'aventure.
Avec Bordage, cette impatience a toujours été présente, et même pressante. Certes, les ficelles sont parfois un peu grosses, mais je ne dissèque pas ce que je lis, je préfère le vivre. J'attend d'un auteur qu'il me transporte, et Bordage le fait très bien.

[Oliv]

Et puis on dira ce qu'on voudra de ses bouquins, n'empêche que Bordage, en vrai, il est très sympa: ce doit être le seul auteur présent au salon de Vendôme à avoir acheté sans rechigner un exemplaire de l'anthologie Solstice...

[Chwip]

C'est vrai. En même temps, je le lâchais plus, le pauvre...

[Krystal]

ce doit être le seul auteur présent au salon de Vendôme à avoir acheté sans rechigner un exemplaire de l'anthologie Solstice...

Pff c'est même pas vrai il y a au moins deux autres auteurs qui l'ont achetée sans rechigné. Oliv arrête de pervertir l'histoire (et l'historienne !)